Cardiaques
Quels effets indésirables ?
POURQUOI ?
Le myocarde qui est le muscle du cœur a la particularité d’être constitué de cellules possédant une capacité de renouvellement faible. Ceci explique le soin tout particulier que portera l’équipe médicale à leur détection et à leur prévention car, dans de rares cas, ces effets secondaires peuvent perdurer.
DE PLUS...
Le champ des effets indésirables cardiaques des chimiothérapies s’est étendu avec le développement de nombreux protocoles associant des cytotoxiques classiques et des thérapies ciblées.
Leur administration a considérablement augmenté, notamment chez les patients âgés et chez les patients avec des antécédents cardiovasculaires et/ou coronaires. Ainsi, pour l’ American College of Cardiology et l’American Heart Association (ACC/AHA), les patients recevant une chimiothérapie doivent être considérés comme appartenant au groupe à risque d’insuffisance cardiaque de stade A...
De nombreux anticancéreux ont des effets indésirables sur le système cardiovasculaire...
IMPORTANT...
De nombreux anticancéreux ont une toxicité vis-à-vis du système cardiovasculaire. Dans certains cas, ces toxicités peuvent contre-indiquer la poursuite du traitement, entraîner une détérioration de la qualité de vie et obérer le pronostic.
UN EFFET SECONDAIRE CONNU ET ANTICIPÉ PAR LES ÉQUIPES SOIGNANTES...
La cardiotoxicité la mieux connue est celle des anthracyclines.
Les autres cytotoxiques associés à un risque important de complications cardiovasculaires comprennent les agents alkylants, comme le 5-fluoro-uracile et le paclitaxel.
Des effets indésirables cardiovasculaires sont également associés à l’utilisation de thérapies ciblées, telles que des inhibiteurs de tyrosine kinase : le trastuzumab, le bévacizumab, ou des médicaments utilisés dans le traitement des hémopathies malignes, tels que l’acide tout-trans-rétinoïque et le trioxyde d’arsenic.
La complication cardiaque la plus sévère des thérapies anticancéreuses est l’insuffisance cardiaque congestive, liée principalement à l’utilisation des anthracyclines, du cyclophosphamide ou du trastuzumab, le plus souvent à forte dose. L’ischémie myocardique est principalement en relation avec l’exposition à l’interféron et aux antimétabolites.
LES AUTRES EFFETS INDÉSIRABLES
Il peut s'agir d’hypotension, d’hypertension, des arythmies et des troubles de conduction intra-cardiaque ou des péricardites.
Des complications thromboemboliques sont aussi fréquentes.
LES MÉDICAMENTS CONCERNÉS
LES ANTHRACYCLINES
Le contexte
Les anthracyclines exercent une cardiotoxicité dose dépendante, cumulative et le plus souvent irréversible. Elle se manifeste par le développement d'une cardiomyopathie dilatée (gros cœur), pas toujours symptomatique. On estime qu'à 400 mg/m², on a 10 à 50 % d'atteintes infracliniques de baisse de la fraction d'éjection (FEVG - Fraction d'Éjection du Ventricule Gauche), marqueur de la contractibilité du cœur, de 10 %.
Le délai d'apparition
Il est variable. La cardiotoxicité peut se manifester dès les premières cures ou ne se révéler que plusieurs années après. C'est pourquoi un bilan cardiologique préalable sera demandé, avec évaluation de la FEVG par échographie, est indispensable ainsi qu'un suivi régulier de cette FEVG tout au long de la chimiothérapie.
- Aiguës, rares consistant surtout des troubles du rythme cardiaque (tachycardie, extrasystoles, etc.),
- Subaiguës, survenant dans les 8 mois suivant la fin du traitement avec un pic au 3 ème mois,
- Tardives qui peuvent s’observer longtemps après l’arrêt de la chimiothérapie.
Il s’agit essentiellement d’une baisse de la force de contraction du muscle cardiaque et plus rarement de troubles du rythme. Ces effets secondaires sont fonction de la dose reçue.
Il faut savoir, aussi, que la susceptibilité individuelle à ce type de médicaments varie de 2 à 8 % à 5 ans lorsque les doses sont inférieures à 550 mg/m².
Très fréquemment des troubles du rythme bénins transitoires peuvent être observés. Plus rarement, des symptômes pouvant rappeler une angine de poitrine sont décrits. Ces troubles sont réversibles à l’arrêt du traitement. Il faut savoir que la réintroduction de ce type de médicament est à risque.
Le cisplatine (effet plus rare non dose-dépendant) et la mitomycine sont exceptionnellement responsables, au cours des premières administrations, de choc ou d'insuffisance cardiaque.
Ce type d’incident peut aussi se rencontrer avec les alcaloïdes de la pervenche.
Ces incidents se rencontrent essentiellement lorsque médicament est donné en association avec une anthracycline, comme la doxorubicine et l’épirubicine. Ils sont plus rares avec le paclitaxel (Taxol™) ou le docétaxel (Taxotère™).
Les taux de FEVG < 50 % post traitement sont de 27 % après Herceptin TM /adriamycine, 13 % après Herceptin TM /paclitaxel et de 8 % après Herceptin TM seule.
Une prévention est possible dans certains cas...
COMMENT ?
Dans une certaine mesure, la cardiotoxicité chronique, liée à l’utilisation de la doxorubicine ou de l’épirubicine peut être prévenue par la prescription de certains médicaments, comme, la Digoxine™ ou le dexrazoxane (Cardioxane™).
LE DEXRAZOXANE (CARDIOXANE™)
De quoi s’agit-il ?
C’est une prodrogue qui se transforme après pénétration dans la cellule en métabolites chélateurs du fer. Lorsque le dexrazoxane est administré en même temps qu'une anthracycline comme la doxorubicine et la daunorubicine, le complexe anthracycline/fer formé dans la cellule hydrolyse le dexrazoxane en métabolites dont la structure est proche de celle de l'ETDA. Ces métabolites, en particulier l'un d'entre eux, piègent le fer intracellulaire et forment un complexe avec l'anthracycline/fer, réduisant ainsi la production de radicaux libres.
Il ne protège pas contre la toxicité extracardiaque induite par les anthracyclines. Il ne réduit pas l'activité antitumorale des anthracyclines.
En pratique…
Le dexrazoxane est indiqué dans la prévention de la cardiotoxicité chronique cumulative liée à l’utilisation de la doxorubicine ou de l’épirubicine.
Ce médicament, relativement bien toléré, doit être administré par perfusion intraveineuse brève (15 minutes) environ 30 minutes avant l’administration de l’anthracycline à une dose égale à 20 fois celle de l’équivalent doxorubicine ou 10 fois celle de l’épirubicine.
La surveillance cardiologique durant le traitement
AVANT
Si vous devez recevoir des « anthracyclines », un bilan cardiologique sera demandé avant le traitement. Il comprendra : un électrocardiogramme (ECG) et une échographie cardiaque avec mesure de la fraction d’éjection du ventricule gauche.
DURANT
La surveillance « standard » durant la chimiothérapie usuelle est la suivante :
- Une échographie cardiaque avant chaque nouvelle cure,
- Au-delà d'une dose cumulée totale de 300 mg/m² d'anthracyclines (doxorubicine, épirubicine des protocoles FAC ou FEC, par exemple), une scinti-angiographie est conseillée avant chaque nouvelle cure, si elle est accompagnée d'une irradiation du thorax de plus de 1 000 cGy.
- Au-delà d'une dose cumulée totale de 400 mg/m², une scinti-angiographie devrait être effectuée avant chaque nouvelle cure, même en l'absence d'irradiation du thorax.
Les problèmes possibles après la chimiothérapie
APRÈS LA CHIMIOTHÉRAPIE
Ils sont rares. Ils surviennent dans les heures ou les jours suivant l'injection. Ils consistent en plusieurs types d'effets qui disparaissent avant la cure suivante, comme, par exemple :
- Des troubles du rythme : cœur battant irrégulièrement (arythmie)
- Troubles de conduction : cœur très lent
- Un épanchement de liquide autour du cœur (péricardite)
- Une atteinte du muscle cardiaque (myocarde) ou myocardite.
PLUS TARD
Une insuffisance cardiaque peut être observée d’un mois après la dernière injection et jusqu'à deux ans après. Les facteurs de risque sont, après l'exposition aux anthracyclines :
- Une dose cumulée totale élevée,
- Des concentrations sanguines élevées (au pic de concentration),
- Une irradiation médiastinale ou cardiaque,
- Une administration concomitante d'autres substances potentiellement cardiotoxiques comme le cyclophosphamide, la cytosine arabinoside.
- Votre âge au moment de l'exposition et le temps écoulé depuis la fin de la chimiothérapie.
Bilan de suivi cardiologique
Recommandations |
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Bilan systématique dans l’année suivant l’arrêt du traitement En cas d'anomalie En l'absence d’anomalie |
Les médicaments contre l’angiogenèse
En raison de leur mode d’action, tous les médicaments de cette classe thérapeutique peuvent avoir des conséquences cardiovasculaires. Il s’agit le plus souvent d’augmentation de la pression artérielle (hypertension) et d’albumine dans les urines (protéinurie). Les effets sont, cependant, variables selon les médicaments.
- L’Avastin™ peut augmenter le risque de thrombose, d’augmentation de la tension artérielle et parfois, très rarement de poussée d’insuffisance cardiaque.
- Le sunitinib (Sutent™) et le pazopanib peuvent, rarement, engendrer des thromboses et plus fréquemment une hypertension artérielle.
- Le sorafénib (Nexavar™) peut, également, induire une hypertension artérielle et, exceptionnellement une atteinte du myocarde.
Pour résumer
La complication cardiaque la plus sévère des thérapies anticancéreuses est l’insuffisance cardiaque congestive, liée principalement à l’utilisation des anthracyclines, du cyclophosphamide ou du trastuzumab (Herceptin™), le plus souvent à forte dose.
L’ischémie myocardique (infarctus du myocarde) est principalement en relation avec l’exposition à l’interféron et aux antimétabolites.
D’autres effets indésirables peuvent survenir tels que l’hypotension, l’hypertension, les arythmies et les troubles de la conduction cardiaque, les péricardites et les complications thrombo-emboliques.
Mise à jour
28 avril 2020