La chimiothérapie

La chimiothérapie a une place importante dans le traitement du cancer du poumon...

EN DEUX MOTS...

La chimiothérapie est administrée en cycles. Chaque période de traitement est suivie d'une période de repos thérapeutique permettant la récupération des lignées cellulaires normales affectées par le ou les médicaments.
La durée totale d'une chimiothérapie est variable selon les schémas thérapeutiques utilisés. La durée moyenne du traitement est de six mois.
L'évaluation de l'efficacité du traitement se fait après le second ou le troisième cycle de chimiothérapie à partir des données de l'imagerie médicale.

DANS LE CAS DU CANCER DU POUMON

Traditionnellement, la chimiothérapie comporte 4 à 6 cycles en première ligne.
En cas de progression, une seconde ligne est proposée.
L'opportunité d'un traitement de maintenance par le permetrexed (Alinta™ et génériques), par une thérapie ciblée ou par une immunothérapie, dans des indications précises, sont des nouvelles options confortées par les résultats d'études cliniques récentes.

La chimiothérapie de première ligne des cancers non à petites cellules

LES INDICATIONS RECONNUES

La chimiothérapie est l'un des traitements de base pour contrôler les formes avancées de la maladie et s’il existe des métastases.
La chimiothérapie adjuvante est utilisée pour compléter la chirurgie pour les cancers de stade II et IIIA et ceci quel que soit l'âge depuis les résultats positifs du International Adjuvant Lung Trial (IALT) publiés en 2004.
Au stade IA, l’effet de la chimiothérapie semble délétère.
Son intérêt dans les stades IB reste discuté. L'indication de de traitement est formelle en cas de :

  • Tumeur de taille > 4 cm
  • Présence de plusieurs nodules
  • Atteinte ganglionnaire N1 et N2
  • Atteinte de la plèvre viscérale/pariétale

AVEC QUELS MÉDICAMENTS EN PREMIÈRE LIGNE ?

Ce qui dit la recherche clinique...

Grâce aux résultats des études cliniques contrôlées, le bénéfice thérapeutique de plusieurs molécules a été démontré sans ambiguïtés.
Habituellement deux médicaments sont associés (doublet) car les essais thérapeutiques ont montré la supériorité de cette approche, sous réserve qu’elle soit tolérable, par rapport aux monothérapies. En revanche, l'utilité de l’association de trois médicaments (triplet) n'est pas démontrée et n'est donc pas recommandée.

Pour les cancers de type épidermoïdes

Les protocoles de chimiothérapie sont à base de sels de platine (cisplatine ou carboplatine). Tous les protocoles (doublets) validés à ce jour sont équivalents en termes d'efficacité pour les cancers non à petites cellules mais peuvent avoir des profils de tolérance différenciés.
Pour les traitements adjuvants, le nombre de cycles est limité à quatre. La chimiothérapie est débutée dans les 4 à 8 semaines suivant l’acte chirurgical. 
Habituellement sont proposés les doublets suivants :

  • Vinorelbine (Navelbine™) 30 mg/m²/j à J1, J8, J15 + cisplatine 100 mg/m²/j à J1 ; un cycle tous les 21 jours - Il plusieurs autres variantes. Cette séquence sera répétée tous les 21 jours. Ces médicaments sont administrés en perfusion intraveineuse d'une durée d'environ 2 heures.
  • Gemcitabine (Gemzar™) 100 mg/m²/j à J1, J8, J15 + cisplatine 100 mg/m²/j à J1 ; un cycle tous les 21 jours, plutôt, en cas de cancer de type épidermoïde.
    Cette séquence sera répétée tous les 21 jours. Ces médicaments sont administrés en perfusion intraveineuse d'une durée d'environ 1 heure 30.
  • Docétaxel (Taxotère ™ et génériques) 75 mg/m² + cisplatine 75 mg/m², à J1 toutes les trois semaines. Ces médicaments sont administrés en perfusion intraveineuse d'une durée d'environ deux heures.
  • Paclitaxel (Taxol™) 200 mg/m² + carboplatine AUC6, à J1 toutes les trois semaine. Ces médicaments sont administrés en perfusion intraveineuse d'une durée d'environ 4 heures.

D’autres médicaments peuvent, plus rarement et plutôt pour le traitement des cancers à petites cellules être proposés, comme les inhibiteurs de la topo-isomérase I, dérivés de la camptothécine : topotécan (Hycamtin™) et l'irinotécan (Campto™).

Pour les cancers de type non-épidermoïdes

Le protocole standard comporte du permetrexed (Alinta™ et génériques) 500 mg/m² à J1 de chaque cycle de 21 jours + cisplatine 75 mg/m²/j à J1
Il est proposé en raison de sa meilleure tolérance les adénocarcinomes ou les cancers à grandes cellules. La veille, le jour même et le lendemain de la chimiothérapie, on vous donnera un traitement de cortisone par la bouche.

Il n'existe pas de mutation activatrice du récepteur du facteur épidermoïde de croissance (EGFR) ou son statut n'est pas connu...

Il y a deux options :

  • Il n'y a pas de contre indication au bevacizumab (Avastin ), ce médicament est ajouté à la chimiothérapie (bio-chimiothérapie)
  • Il y a une contre indication à l'utilisation du bevacizumab et dans ce cas la chimiothérapie est du même type que celle décrite plus haut (sel de platine + permetrexed ou gemcitabine ou paclitaxel ou docétaxel)

Il existe une mutation activatrice de l'EGFR (addiction tumorale)...

Deux options sont envisageables :

 Y A-T-IL UNE OPTION PRÉFÉRABLE ?

Scientifiquement ce n’est pas clair ! Dans une étude portant sur plus de mille malades, aucune différence importante entre les chimiothérapies testées, cisplatine + Taxol™, cisplatine + Gemzar™, cisplatine + Taxotère™ et carboplatine + Taxol™, n’a été montrée.
La toxicité hématologique était légèrement plus marquée avec l’association cisplatine + Gemzar™ et une meilleure tolérance du protocole carboplatine + Taxol™ fut observée.

LES MONOTHÉRAPIES

Les monothérapies avec la vinorelbine (Navelbine™) ou la gemcitabine (Gemzar™) sont utiles pour les formes avancées métastatiques de la maladie. Elles sont indiquées, en première intention chez les patients âgés ou avec un indice de performance altéré (indice d’activité Organisation mondiale de la santé (OMS) > 2).

La chimiothérapie de seconde ligne

ELLE EST EFFICACE...

Grâce aux essais thérapeutiques, en cas de rechute, le bénéfice, en termes de survie, de qualité de vie et de contrôle des symptômes d’une seconde ligne de chimiothérapie est maintenant acquis.
La chimiothérapie de deuxième ligne est maintenant proposée aux patients gardant un bon indice de performance (indice d’activité OMS < 2), après échec ou toxicité d’une première ligne de chimiothérapie.

LES MÉDICAMENTS 

Dans ce cas, il s'agit d'une monothérapie faisant appel au docétaxel (Taxotère™) qui est l’option standard. D’autres monothérapies, avec le permextred (adénocarcinomes) la vinorelbine ou l’ifosfamide sont possibles.
Les alternatives possibles font appel aux thérapies ciblées par l'erlotinib (Tarceva) ou le geftinib (Iressa™).

La chimiothérapie de troisième ligne

Plusieurs essais thérapeutiques ont démontré la pertinence de cette approche en montrant une amélioration de la survie et de la qualité de vie.
La molécule recommandée pour cette ligne de traitement est l'erlotinb (Tarceva™) qui est une molécule de thérapie ciblée . Elle est présentée dans un chapitre spécifique consacré à ces médicaments.

Les modalités d’administration

LA CHIMIOTHÉRAPIE NÉO-ADJUVANTE

Ce que nous savons…

Elle est réalisée avant l’opération chirurgicale et permet d'obtenir une réduction du volume tumoral ce qui facilite ensuite le geste chirurgical. Elle permet, aussi, de diminuer la dissémination dans l’organisme des cellules cancéreuses. Les essais thérapeutiques ont montré que cette approche était techniquement réalisable et qu’elle était raisonnablement tolérable. Comme les résultats à long terme sont encore fragmentaires, ce n’est pas une procédure « standard ».

Les options

Elle peut être proposée dans les formes localisées ou localement avancées correspondantes aux stades I, II et surtout au stade IIIA.
Les protocoles les plus utilisés comprennent du cisplatine ou du carboplatine auquel est associé, selon les oncologues, la gemcitabine (Gemzar™), l’ifosfamide (Holoxan™), le paclitaxel (Taxol™) ou la mitomycine C .
La chimiothérapie néoadjuvante est généralement complétée par une chimiothérapie adjuvante et/ou une radiothérapie.

LA CHIMIOTHÉRAPIE ADJUVANTE

Ce que disent les essais cliniques…

Elle permet de stériliser les lésions résiduelles après la chirurgie, ce qui peut diminuer le risque de rechutes. Les grandes conclusions des essais thérapeutiques portant sur la chimiothérapie adjuvante sont les suivantes :

  • Elle permet une augmentation du temps sans progression de la maladie et de la survie à 5 et 7 ans, aux stades II et IIIA lorsque des ganglions sont touchés
  • L’effet est indépendant de l’âge, du sexe, de l’indice de performance et du sous-type histologique
  • Les schémas à base de sels de platine, en particulier le cisplatine donnent des résultats plus nets.

 Les protocoles habituels

Ils comprennent du cisplatine auquel est associé, selon les équipes, la vinblastine, la vinorelbine, la vindésine ou l’étoposide, comme, par exemple :

  • Cisplatine + vinorelbine (Navelbine™) toutes les semaines, est une option fréquemment proposée 
  • Cisplatine + ifosfamide (Holoxan™)
  • Cisplatine + vindésine (Eldisine™) ou vinblastine (Velbé™)
  • Carboplatine + paclitaxel (Taxol™) en 4 cures

 Le traitement est débuté 6 à 8 semaines suivant l'intervention.

La radio-chimiothérapie adjuvante

De plus en plus souvent, la chimiothérapie adjuvante est administrée conjointement avec la radiothérapie (60 - 66 Gy en 30 - 33 fractions). Elle est proposée au stade IIIA. Le protocole étoposide, 50 mg/m², à J1 à 5 et J29 à J33) + cisplatine, 50 mg/m², à J1, 8, 29 et 36 est souvent proposé. 
Des études sont en cours pour valider son utilisation à des stades opérables I et II.

L'immunothérapie ciblée

La nouvelle option est d'ajouter pendant 1 an une immunothérapie par le durvalumab (Imfinzi™) qui est un inhibiteur du ligand du récepteur PD1.  

Le cas des cancers à petites cellules

LA CHIMIOTHÉRAPIE DE PREMIÈRE LIGNE (INTENTION)

En l’absence de contre indication, il s'agit d'une association d'un platine (cisplatine ou carboplatine) et d’etoposide.
Le traitement est administré tous les 21 jours. Le nombre total de cycles est habituellement de 6.
Pour les sujets fragiles ou âgés, il n’existe pas de thérapeutique standard. Le traitement sera proposé après discussion de votre dossier par l'équipe médicale (RCP)

LA CHIMIOTHÉRAPIE DE SECONDE LIGNE (INTENTION)

En cas d'échec d’une première ligne de chimiothérapie, il existe deux options selon la date de survenue de la rechute après le traitement initial :

  • Plus de 3 mois après le traitement initial, vous êtes considéré comme « sensible » et la chimiothérapie de première intention peut, alors, être reprise.
  • Précoce (moins de 3 mois après le traitement initial), vous êtes « réfractaire ». Dans ce cas, si votre été général est bon (score PS < 2 ), l’opportunité d’une deuxième ligne peut être discutée.

UNE NOUVEAUTÉ : LA LURBINECTINE 

Le Zepzelca™ est un analogue du composé marin isolé de l'ascidie plissée Ecteinacidia turbinata où un atome d'hydrogène a été remplacé par un groupe méthoxy. C'est un inhibiteur sélectif des programmes de transcription oncogénique dont de nombreuses tumeurs, dont le cancer du poumon à petites cellules, sont particulièrement dépendantes. De plus, la lurbinectédine inhibe la transcription oncogénique dans les macrophages associés aux tumeurs, réprimant ainsi la production de cytokines essentielles à la croissance des tumeurs.

Il est indiqué pour le traitement du cancer du poumon à petites cellules de stade III ou métastatique qui a progressé au cours d'un traitement contenant du platine.

 La dose recommandée est de 3,2 mg/m², administrée par perfusion intraveineuse sur une période de 60 minutes et répétée tous les 21 jours, tant que dure l’absence de progression de la maladie ou jusqu’à la survenue d’une toxicité inacceptable.

Les principaux effets secondaires sont : la fatigue, des nausées ou des vomissements, une baisse des globules blancs (neutropénie), une diminution de l’appétit, des douleurs musculosquelettiques, une dyspnée, de la constipation, des troubles du transit et une susceptibilité accrue aux infections des voies respiratoires

La chimiothérapie, avant...

LES PRÉCAUTIONS À PRENDRE

Au moment du diagnostic et avant d’entreprendre le traitement de chimiothérapie, des examens sont nécessaires.
Il est préférable d’éliminer toute source d’infection avant de débuter une chimiothérapie. La source d’infection la plus fréquente est dentaire. Si votre traitement de chimiothérapie n’est prévu que dans 2 ou 3 semaines, vous avez le temps de faire examiner et traiter vos dents chez votre dentiste, avant de débuter.

LES EXAMENS NÉCESSAIRES...


Une prise de sang

Elle sera systématique avant la chimiothérapie pour s’assurer du bon fonctionnement d’organes essentiels pour le métabolisme et l’élimination des médicaments, tels que le foie et le rein.

Dans cette prise de sang, il sera également vérifié que les cellules circulantes du sang (globules blancs, globules rouges et plaquettes) sont à un taux satisfaisant, car ce sont les cellules saines de l’organisme dont la production est la plus sensible aux médicaments de la chimiothérapie.
Si le taux de globules rouges (ou plus précisément, le taux d’hémoglobine) est trop bas, il vous sera proposé de recevoir une transfusion de sang (culots globulaires) avant de réaliser la chimiothérapie. Une autre option est l’administration d’érythropoïétine ou EPO (Eprex™, Recornom™, Aranesp™) en injection sous-cutanée. L’EPO est une hormone naturelle, sécrétée par le rein, qui stimule la production des globules rouges par la moelle osseuse, site naturel de fabrications des cellules du sang.

Les bilans spécifiques

Certains médicaments de chimiothérapie peuvent présenter une toxicité orientée vers certains organes précis. Des examens peuvent alors être utiles pour vérifier que cet organe fonctionne de façon satisfaisante chez vous avant d’administrer le médicament.

La fonction cardiaque

Certains des médicaments, comme les anthracyclines, ont une toxicité pour le muscle cardiaque. Il est parfois préférable de les éviter chez les patients ayant déjà une maladie cardiaque. Pour s'en assurer, il faut faire un examen de la fonction cardiaque, c'est le calcul de la fraction d'éjection systolique (FES) qui mesure la capacité du ventricule gauche à se contracter.
Cette mesure peut se faire de deux manières : par échographie cardiaque ou par mesure isotopique. La première est une simple échographie, la seconde comprend l'injection d'un marqueur radioactif et l'examen de son passage dans le cœur par une caméra spéciale (scintigraphie).

LA POSE D’UN CATHÉTER CENTRAL

POURQUOI ?

Si un médicament doit être administré sur plusieurs heures et à plus forte raison sur plusieurs jours, si la durée de la chimiothérapie peut être assez longue, si les veines du (ou des) bras ne sont pas suffisantes ou si les injections précédentes de chimiothérapie ont entraîné une inflammation des veines (veinite), il peut vous être proposé la mise en place d’un cathéter central pour la durée de la chimiothérapie.

LE PRINCIPE


Un cathéter central est inséré dans une grosse veine, veine cave supérieure ou veine jugulaire, avant que celle-ci rejoigne le cœur.
Les cathéters sont composés de matériaux biocompatibles (silicones, polyuréthanes) qui sont bien supportés par l'organisme. Avec un suivi approprié, ces cathéters peuvent rester placés aussi longtemps que nécessaire ce qui évite au patient d’être piqué dans le bras à chaque séance de chimiothérapie.

DEUX SORTES DE CATHÉTERS CENTRAUX


Les cathéters à la peau
 

Ils ont leur extrémité qui ressort à travers la peau, par une petite incision généralement située sous la clavicule, l’os qui relie le sternum à l’épaule. Ils sont installés sous anesthésie locale. On pose la perfusion directement dans l’extrémité du tube du cathéter qui ressort.

Les chambres implantables

Le Port-A-Cath™ (PAC), Infusaport™, ou les autres marques n’ont pas leur extrémité qui ressort à travers la peau, car elles sont reliées à un réservoir, ou chambre, qui est inséré sous la peau. Le cathéter et la chambre sont implantés sous anesthésie locale ou sous anesthésie générale de courte durée. La chambre est mise sous la peau du thorax, au-dessous de la clavicule, généralement assez loin du sternum pour des raisons esthétiques. La chimiothérapie est administrée en piquant dans le réservoir avec des aiguilles spéciales.

Les incidents liés au dispositif sont rares mais doivent amener à consulter :

  • Une douleur et rougeur au niveau du boîtier doivent faire craindre une infection
  • Une douleur et gonflement du bras peuvent faire suspecter une obstruction de la veine
  • Un mauvais fonctionnement de la chambre.


Le pour et le contre...

Les avantages et les désavantages des deux types de cathéters sont résumés dans le tableau ci-dessous :

 

 

 

  CATHÉTERS À LA PEAU

CHAMBRE

Nombre de tuyaux

1 à 3

1

Maintenance

Tous les jours

Utilité mise en question

Restriction d’activités

Douche, natation

Aucune

Prises de sang

Aisées

Peu fiables

Accès

Externe

Aiguille

Débit

Fonction du diamètre du tuyau

Complications

Possibles

Plus rares

Ablation

Facile en ambulatoire

Petite intervention

 

Mise à jour

12 juillet 2023