help

Les leucémies de l'enfant

Généralités

Les leucémies aiguës représentent un tiers des cancers de l’enfant. On dénombre de 400 à 500 nouveaux cas par an en France, avec deux pics de fréquence : 2 à 5 ans (principal pic) et l'adolescence.
Ce sont des proliférations malignes de précurseurs de cellules sanguines bloqués à un stade précoce de leur différenciation (blastes).
On distingue deux variétés de leucémies aiguës suivant le type cytologique des cellules leucémiques (blastiques) :

  1. Les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) dans 80 % des cas
  2. Les leucémies aiguës myéloïdes (LAM) beaucoup moins fréquentes 
     

@ Pour plus de détails, allez page spécifique sur le site InfoCancer

 

Les leucémies aiguës lymphoblastiques

C'est le cancer le plus fréquent chez les enfants, avec une incidence annuelle de trois à quatre nouveaux cas pour 100 000 enfants et adolescents de moins de 16 ans.
Elle touche essentiellement les enfants d’âge préscolaire (2-6 ans) mais peut également survenir chez le nourrisson et l’adolescent.
Ce terme regroupe des entités différentes au pronostics différents :

  • 75 % sont des proliférations lymphoïdes de cellules immatures de la lignée B
  • 20 % sont des proliférations de la lignée T
  • Très rares, des proliférations de cellules lymphoblastiques B matures : dans cette situation, il s’agit de leucémies de Burkitt (leucémie L3 dans la classification FAB [franco-américano-britannique] ou B4 dans la classification EGIL [European Group for the Immunological Characterization of Leukemias])

C'est une urgence...

Ce sont, tout d'abord, des manifestations liées à l'insuffisance de production de moelle osseuse (médullaire) des éléments du sang circulant :

  • Une anémie (diminution des globules rouges) se traduisant: asthénie, pâleur, parfois associé à un essoufflement à l'effort (dyspnée)
  • Une thrombopénie (diminution du nombre de plaquettes) : risque d'hémorragies cutanéomuqueuses, purpura pétéchial, ecchymoses diffuses ou dans des sites inhabituels, épistaxis (saignement de nez), gingivorragies, hématurie (sang dans les urines), sang dans les selles ;
  • Une neutropénie (diminution du nombre des globules blancs portant sur les polynucléaires neutrophiles impliqués dans la défense contre les infections : fièvre prolongée, angine récidivante ou ne cédant pas aux antibiotiques, aphtose.


Les manifestations en rapport avec le syndrome tumoral liées à la prolifération des cellules leucémique dans la moelle osseuse et les organes hématopoïétiques secondaires (rate) et les organes lymphoïdes :

  • Douleurs osseuses (par exemple, un enfant ne voulant plus monter les escaliers, ou voulant être porté…)
  • Un gros foie (hépatomégalie), une grosse rate (splénomégalie), des ganglions (adénopathies) périphériques, amygdalomégalie (hypertrophie des amygdales), gros testicule
  • Une gêne respiratoire voire syndrome cave supérieur en cas de syndrome tumoral médiastinal
  • Des signes neurologiques périphériques, en relation avec une compression médullaire sur un tassement vertébral voire envahissement tumoral ou centraux , en relation avec une atteinte neuro-méningée.
     

Le diagnostic

L’hémogramme (NFS-plaquettes)

Cet examen de base peut donner des informations très importantes, comme pouvoir préciser la forme de la maladie ;

  • La forme avec une augmentation importantes du nombre de globules blancs (hyperleucocytaire) avec de nombreuses cellules anormales (blastose) sanguines, d’importance variable
  • La forme avec une disparition partielle des trois lignées sanguines (pancytopénique) sans blastes ;


Rarement, la NFS est encore parfois normale, ce qui n’élimine pas le diagnostic.

Le myélogramme

C'est l'examen de la moelle osseuse à partir d'une ponction sternale ou d'une ponction biopsie ostéo médullaire. Le diagnostic ne pourra être porté qu’après réalisation d’un myélogramme qui comprend :

  • Une cytologie médullaire au microscope : > 20 % de cellules blastiques
  • Un examen immunohistochimique : coloration négative par la myéloperoxydase et les estérases
  • Une identification de la LAL dans la classification FAB (L1, L2, L3) : taille et régularité des cellules.
     

Le myélogramme est complété par les examens suivants :

Un immunophénotypage sur cellules médullaires en suspension en cytométrie de flux pour permettre

  • La confirmation du caractère hématopoïétique de la prolifération (CD34*)
  • Le phénotype "B" des lymphocytes : présence d’antigènes de la lignée "B" parmi CD10, CD19, CD20, CD22, CD79a
  • Le phénotype "T" des lymphocytes : présence d’antigènes de la lignée "T" parmi CD2, CD3, CD4, CD7, CD8
     

Le caryotype hématologique* médullaire qui va particulièrement étudier les caractéristiques suivantes :

  • Le nombre de chromosomes (ploïdie) des cellules blastiques : normoploïdie : 46 chromosomes, hypoploïdie < 46, hyperploïdie > 46)
  • L'existences d'anomalies structurales des lymphocytes : délétions, inversions péricentriques, duplications, translocations
     

Examen en biologie moléculaire à la recherche de :

  • La présence de transcrits de fusion (ETV6-RUNX1, BCR-ABL, PBX-E2A, MLL-AF4…)
  • L'existence possible de marqueur(s) moléculaire(s) pour le suivi de la maladie après rémission complète cytologique (RC).
     

Les autres examens nécessaires au diagnostic et à la prise en charge

  • L'examen du liquide céphalo- rachidien (LCR ou LCS) obtenu par ponction lombaire (PL) à la recherche d’un envahissement neuro-méningé initial (présence de blastes lors du décompte cellulaire)
  • Des examens d’imagerie en fonction des symptômes : radiographie de thorax, échographie abdominale et/ou testiculaire, IRM cérébrale
  • Un bilan pré-thérapeutique global
  • Un bilan pré-transfusionnel, car souvent des transfusions sanguines seront nécessaires
  • La prévention du syndrome de lyse tumoral à la suite du traitement: hyperuricémie, hyperkaliémie, hypocalcémie, hyperphosphorémie.
     

 

*CD est l'abréviation du terme « cluster de différenciation ». Les molécules CD sont des marqueurs de surface cellulaire très utiles pour l'identification et la caractérisation des leucocytes et des différentes sous-populations de leucocytes
** La cytogénétique hématologique étudie les anomalies chromosomiques acquises dans les hémopathies malignes en utilisant des techniques de cytogénétique conventionnelle (caryotype) et de cytogénétique moléculaire (FISH)

Le traitement

LE CYCLE DE TRAITEMENT

La prise en charge doit être réalisée en milieu spécialisé pédiatrique. La nature et les détails du traitement seront définis lors de la Réunion de Concertation Professionnelle (RCP).
Le complet cycle du traitement comporte, comme chez 'adulte, 3 ou 4 phases, selon le plan de traitement établi lors de la RCP.
Toutes les phases du traitement comprennent une chimiothérapie. La durée du traitement global est longue : 2 à 4 ans

LE TRAITEMENT

Les principes thérapeutiques généraux de la prise en charge thérapeutique d’une LAL de l’enfant sont les suivants:

  • Tout d'abord la correction d’une éventuelle urgence symptomatique
  • La prévention et/ou prise en charge d’un syndrome de lyse tumorale : hyperhydratation, hyperdiurèse, uricolytiques (médicament augmentant l'élimination de l'acide urique);
  • L'instauration d'une polychimiothérapie séquentielle intensive incluant :
  • La prévention ou traitement des localisations neuro-méningées : injections intrathécales de chimiothérapie, voire radiothérapie cérébrale.
     

L’intensité de la polychimiothérapie est fonction des caractéristiques immuno-phénotypiques, cytogénétiques et moléculaires de la maladie lors du bilan initial ainsi que de la cortico-sensibilité évaluée à J8 du traitement puis de la chimiosensibilité évaluée à différents temps précoces de la maladie.

Le traitement de consolidation
Il est administré une fois obtenue la rémission. Son objectif est de détruire toutes les cellule leucémiques qui pourraient rester dans le sang ou la moelle osseuse afin de prévenir la réapparition de la maladie.
Le traitement dure de 4 à 6 semaines.
Les médicaments sont différents de ceux employés pour le traitement d’induction. Le type de chimiothérapie de consolidation et son intensité peuvent varier selon le niveau de risque. Le traitement de consolidation est aussi appelé traitement d’intensification.

Le traitement d’entretien ou de continuation
Il dure environ 1 an et demi pour les filles et 2 ans et demi pour les garçons. Son objectif est toujours de maintenir la rémission, détruire toute cellule leucémique qui reste et prévenir la réapparition de la maladie.
On administre une chimiothérapie à faible intensité (doses moins fortes et moins fréquentes) sur une plus longue période pour maintenir la rémission.
La phase d’entretien comporte habituellement la prise de médicaments par voie orale en ambulatoire. On peut aussi administrer une chimiothérapie intraveineuse et intrathécale à certains moments (intermittente) au cours de cette phase.

NE PAS OUBLIER...

La durée totale du traitement est de 24 à 30 mois dont 6–8 mois de traitement intensif intraveineux et 18–24 mois de traitement d’entretien essentiellement par voie orale. 

Le pronostic s'améliore...

Le pronostic des LAL de l’enfant est meilleur que celui des adultes. Plus de 80 % des enfants et adolescents entre les âges de 1 an et 18 ans peuvent être guéris par les protocoles actuels. 
Le pronostic est fonction :

  • Des caractéristiques initiales de la maladie : leucocytose : hyperleucocytose péjorative si > 50 000/mm3, l'existence d'un envahissement neuro-méningé,
  • L'immunophénotype : les LAL "T" sont de moins bon pronostic que les LAL "B",
  • L'âge : pronostic sombre chez les enfants d’âge < 1 an, moins bon pronostic chez les adolescents
  • De la réponse au traitement :
    • La sensibilité au traitement par la cortisone (cortico-sensibilité) de la LAL à J8
    • L'obtention d'une rémission cytologique en fin d’induction
    • De la décroissance rapide de la maladie résiduelle (mesurée par PCR ou cytométrie de flux).

Mise à jour

31 août 2022