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Les ARN interférants

Dans les cellules, les ARN remplissent au moins trois rôles distincts et complémentaires...

L’ARN est le support temporaire de l'information génétique.

C'est l'ARN messager (ARNm) qui est utilisé par la cellule pour transmettre l'information correspondant à un gène donné à l'extérieur du noyau, puis pour synthétiser des protéines à partir de ces informations. Il est l'intermédiaire entre le plan directeur stocké dans l'ADN et les agents d'exécution que sont les protéines.

Les ARN sont des catalyseurs enzymatiques...

Comme les protéines, les ARN peuvent se replier pour former des structures complexes. Ces structures permettent à certains ARN de se comporter comme des enzymes, on parle alors de ribozyme.
Le ribosome, la ribonucléase P et certains introns sont des ribozymes. La machinerie d'épissage des ARNm, le splicéosome est également un ribozyme.

Les ARN servent de guide pour des enzymes...

Certains ARN sont utilisés comme cofacteurs par des protéines pour permettre leur ciblage vers des séquences spécifiques.
Parmi ceux-ci, on peut citer les petits ARN nucléolaires, qui guident les enzymes de modification de l'ARN ribosomique, ou encore les ARN interférents.

Les pétunias...

En cherchant à obtenir, dans les années 1990, la couleur plus mauve des fleurs de pétunias, Richard Jorgensen de l'université de Tucson (Arizona), introduit dans le génome de la plante des copies supplémentaires du gène responsable de la pigmentation mauve des pétales. À sa grande surprise, les fleurs deviennent blanches ou mauves tachetées de blanc.
L’addition du gène entraîne paradoxalement la perte de la pigmentation des pétales....

Le mécanisme de cet énigmatique phénomène sera résolu par Andrew Fire (1959-) et Craig Mello (1960-). Travaillant sur Coenorabditis elegans,un minuscule ver modèle, ils réalisent une expérience remarquable, publiée en 1998, qui démontre que l'ARN double brin inhibe l'action du gène correspondant....

Un rappel...

ADN
Stockage stable de l’information génétique qui est transmise au fil des générations 

ARNm
Intermédiaire instable – Une copie transitoire de l’ADN requise pour la synthèse protéique

Protéine
Molécule qui assure le fonctionnement des cellule (réactions chimiques…) et la régulation de l’expression des gènes

UNE GRANDE DÉCOUVERTE A L'ORIGINE D'UN PRIX NOBEL DE MÉDECINE EN 2006..

L'interférence ARN (RNA interference) ou RNAi*

C’est un processus cellulaire permettant la régulation de l'expression des gènes à l'occasion de la transcription (transcriptionnel) et après la transcription, c’est-à-dire lors de la synthèse des protéines (post-transcriptionnel). 

Andrew Fire et Craig Mello ont obtenu le Prix Nobel en 2006 pour l'explication des bases de ce mécanisme ("RNA interference - gene silencing by double-stranded RNA") chez le nématode Caenorhabditis elegans.

La spécificité de cette répression provient de petits segments d’ARN d'une vingtaine de nucléotides, les « siARN » et les « microARN » (ARNmi), considérés jusqu'à tout récemment comme des produits de dégradation métabolique.

ARN interférents: ARN qui interagissent avec les ARNm pour réguler/empêcher la synthèse de la protéine correspondante.

Il a été probablement sélectionné au cours de l'évolution pour prémunir les cellules contre l'introduction de gènes (en particulier de virus ou de transposons).
Ce mécanisme permet également d'éliminer de la cellule des ARN messagers (ARNm) non fonctionnels. De plus, son étude s'est avéré très utile pour décrypter la fonction de gènes chez le nématode puis chez d'autres organismes, notamment les mammifères.

En résumé...

ARN
(double-brin)

siARN
(double-brin, 21 bases)

Assemblage complexe RISC
(simple brin)

Reconnaissance/clivage de la cible
(centre de l’hybride ARNm/siARN)

Dégradation de l’ARNm-cible
(complémentaire à l’ARN double-brin inducteur)

 

*  Appellations historiques : "cosuppression" chez le pétunia ; "post transcriptional gene silencing" chez les plantes ; "quelling" chez les champignons

Les petits ARN jouent un rôle central dans le mécanisme de l'interférence ARN...

Leurs rôles

Ces petits bouts d'ARN proviennent de gènes qui leur sont propres et dont ils sont les uniques produits.
Les microARN sont, en fait, complémentaires aux ARN messagers (mARN). Lorsqu'ils se fixent à eux, les ARN messagers ne peuvent plus être traduits en protéines.
Des centaines de ces microARN ont été découverts cours des dernières années.

Leur structure

Ce sont des ARN simple-brin longs d'environ 21 à 24 nucléotides qui ne codent pas pour la production de protéines. Il existe plusieurs centaines de gènes de microARN dans les génomes de la plupart des cellules.
Les ARNmi sont des répresseurs post-transcriptionnels. En s'appariant à des ARN messagers (mARN), ils guident leur dégradation, ou la répression de leur traduction en protéine.

Les miARN

Ils sont transcrits sous la forme de longs précurseurs, appelés « pri-ARNmi ». Ces précurseurs sont clivés par une enzyme de la famille Dicer, en un produit intermédiaire, appelé « pre-ARNmi ». 

Le pre-ARNmi est un ARN long d'environ 70 nucléotides, replié en tige-boucle imparfaite par complémentarité de bases entre la première moitié et la deuxième moitié de sa séquence.

Le pre-ARNmi est ensuite clivé par une enzyme cytoplasmique, de la famille Dicer, pour libérer un petit ARN double-brin. Celui-ci, long d'une vingtaine de paires de bases, avec environ 2 nucléotides simple brin à l'extrémité 3' de chaque brin est imparfaitement apparié à une molécule similaire (petit ARN long d'une vingtaine de nucléotides), appelé « ARNmi ».
Au cours de la dernière étape de la maturation de l’ARNmi, ce duplex est ouvert.

Le ARNmi s'associe avec une protéine de la famille Argonaute formant ainsi le complexe « RISC », alors que l’ARNmi est dégradé.
Les enzymes Dicer sont également responsables de la production de petits ARN interférents (ou siRNA) à partir de longs ARN double-brin, au cours du processus d'interférence à ARN.

Les siRNA

Leur fonction

Les petits ARN interférants (ARNsi) pour (small interfering siRNA) remplissent de nombreuses fonctions, en particulier celle de l'inhibition post-transcriptionnelle des gènes.

Les rôles du transcriptome

C’est une entité dynamique, en autorisant ou non la transcription de protéines, permet à la cellule de s’adapter finement en permanence, par rapport : 

  • Au contexte génétique, en inactivant ou en surexprimant des gènes
  • A l’environnement, extérieur (nutriments, oxygénation) ou tissulaire, au stress
  • Au stade du développement, cycle cellulaire, temps…

Une grande famille !

 

Le monde des petits ARN...
  • siARN : small interfering RNA ou petit ARN interférent
  • miARNm : micro ARN (qui comprennent les ARNst pour petits ARN temporaires)
  • snoARN : small nucleolar RNA ou petit ARN nucléolaire
  • snARN : small nuclear RNA ou petit ARN nucléaire
  • circARN : ARN circulaire
  • piARN : PIWI-RNA
  • rasiARN : repeat-associated small interfering
  • stARN : small temporal RNA
  • snmARN : small non-mRNA 21-U ARN
  • Mirtrons : pré-miARNs localisés dans les introns de différents gènes

 

 

De la théorie vers des cibles thérapeutiques…

On connaît maintenant plus de 200 microARN.
Dès aujourd’hui, de nombreuses équipes de chercheurs ont montré que certains micro-ARN sont soit surexprimés soit non exprimés, dans certains types de tumeurs. Parmi ceux-ci, on peut citer :

  • Les miR-15 et le miR-16 sont impliqués dans la leucémie lymphoïde chronique
  • Les miR-143 et le miR-145 sont importants dans la cancérogenèse des cancers colorectaux
  • Le miR-155 /BIC stimule la prolifération des lymphomes « B » à grandes cellules
  • Le cluster miR-17-miR-92 est impliqué dans les lymphomes “B”
  • Le Let-7 est non exprimé dans certains cancers du poumon
  • Le miR-125b est inhibé dans les cancers du sein
  • Le miR-221 est surexprimé alors que le miR-128 et le miR-181a,b,c ne sont pas exprimés dans les glioblastomes

Mise à jour

27 mai 2020