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Les lois de la transplantation

Quelques définitions...

UNE TRANSPLANTATION

La transplantation consiste à prélever un organe, un tissu ou des cellules chez un donneur et à le réimplanter chez un autre individu, le receveur, ou chez le même individu dans un autre site.
C'est une greffe comportant une suture vasculaire, comme, par exemple la transplantation rénale ou cardiaque.
Elle consiste à remplacer un organe vital défaillant d'un malade en implantant un organe sain prélevé, le plus souvent, sur une personne en état de mort cérébrale.
Chez les personnes en état de mort cérébrale (ou encéphalique), le cerveau s'est définitivement arrêté de fonctionner et est entièrement détruit mais l'activité cardiaque et respiratoire peuvent être artificiellement maintenues pendant quelques heures.

LA GREFFE DE TISSUS

Elle substitue à un tissu défaillant d'un patient, un élément du corps humain prélevé sur une personne décédée ou un élément du corps humain recueilli à l'occasion d'une intervention chirurgicale, comme, par exemple, de l'os, une cornée, de la peau...

UN GREFFON

Le greffon est l'organe ou le tissu que l'on greffe.
En général, l'organe doit être de même volume que celui qui est à remplacer (ou légèrement inférieur dans le cas du poumon), en bon état fonctionnel et le plus compatible possible du point de vue immunologique.

Les différents types de greffe...

 

Type de greffe

Modalités

Risque de rejet

Autologue (autogreffe)

Greffe du tissu d'un individu sur lui-même

Non

Isogénique (isogreffe)

Greffe du tissu d'un individu sur un individu génétiquement identique (jumeaux vrais)

Non

Allogénique (allogreffe) Greffe du tissu d'un individu sur un individu génétiquement différent et de la même espèce (la plupart des greffes) Rejet en l’absence d'un traitement immunosuppresseur
Xénogénique (xénogreffe) Greffe d'un individu sur un individu d'une espèce différente  Rejetée même avec un traitement immunosuppresseur

 

 

L'histo-compatibilité

LES GROUPES TISSULAIRES

Du point de vue biologique, chaque être humain se définit par des antigènes réunis en groupes tissulaires qui lui sont propre.
La notion d'histocompatibilité a été introduite en 1930. Les bases de l'histocompatibilité ont été mises en évidence en 1958 par le médecin français Jean Dausset (Prix Nobel de médecine en 1980). Celui-ci démontra l'existence d'antigènes particuliers sur les globules blancs du sang et sur toutes les cellules nucléées de l'organisme. Ces antigènes ont la propriété d'être différents d'un groupe d'individus à un autre, si bien qu'ils constituent une marque de l'identité biologique d'un individu, l'allotype.

HLA...

Les gènes qui gouvernent la synthèse de ces antigènes sont situés sur le chromosome 6 et sont connus sous les noms de complexe majeur d'histocompatibilité (CMH) ou de système HLA (Human Leucocyte Antigen). Les antigènes HLA, propres à chacun, sont présents à la surface de toutes les cellules de l'organisme.

  • Les gènes de classe I codent les antigènes d'histocompatibilité présents sur toutes les cellules nucléées de l'organisme et sont classés en 3 groupes, A, B et C
  • Les gènes de classe II commandent la synthèse des antigènes présents seulement sur certaines cellules du système immunitaire, monocytes, macrophages, lymphocytes B et lymphocytes T activés et sont répartis en 3 groupes, DR, DQ et DP
     

 En pratique...

Les groupes HLA sont identifiés par un simple prélèvement de sang sur les globules blancs (leucocytes).
L’analyse est effectuée par un laboratoire spécialisé, fréquemment situé dans les établissements de transfusion sanguine. Tous les laboratoires réalisant des tests d’histocompatibilité dans le cadre de la greffe de CSH doivent être accrédités par l’EFI (European Federation for Immunogenetics) et suivre les standards définis révisés annuellement par celle-ci.

LA COMPATIBILITÉ...

Plus les caractéristiques tissulaires du donneur concordent avec celles du receveur, mieux le tissu sera accepté par le receveur.
Une sélection appropriée des donneurs, dont les antigènes HLA concordent au mieux avec les antigènes HLA du receveur, permet de prévenir l'activation des cellules T cytotoxiques (CD8+) et d'obtenir une compatibilité tissulaire (histocompatibilité) optimale. Dans le cas contraire, il y a rejet du greffon et donc échec de la greffe.
Cette compatibilité a un impact significatif sur le succès de la greffe et contribue aux réactions HVG (host versus graft) et GVH (graft versus host).

Chaque individu dispose d'un minimum de 6 groupes différents d'antigènes HLA

 

HLA de classe I HLA de classe II

A

B

C

DR

DQ

DP

 

La probabilité de trouver un donneur compatible

Définir un niveau de probabilité informe le médecin qui va pratiquer la greffe des possibilités d’identifier un donneur identique après la réalisation de typages complémentaires et permet d’orienter la stratégie (inscription sur le fichier France greffe de Moelle (FGM) ou choix d’un autre type de donneur). Cette probabilité peut être définie pour la recherche d’un donneur 10/10 ou 9/10.
Le niveau de probabilité est habituellement défini par les critères suivante :

  • Probabilité FAIBLE lorsque le nombre de donneurs 10/10 potentiels est inférieur à un (vraisemblance inférieure à 1 × 10−7)
  • Probabilité INTERMEDIAIRE lorsque le nombre de donneurs 10/10 potentiels est compris entre un et cinq (vraisemblance comprise entre 1 et 5 × 107)
  • Probabilité FORTE lorsque le nombre de donneurs 10/10 potentiels est supérieur à cinq (vraisemblance supérieure à 5 × 10−7).

Les lois de la transplantation

MODÈLE EXPÉRIMENTAL DE GREFFE

Prenons deux animaux, A et B, chez lesquels expérimentalement, et évaluons les différentes modalités de greffe.

  • Greffes entre animaux génétiquement identiques : il n'y a pas de rejet.
  • Greffes allogéniques entre 2 lignées incompatibles au niveau du CMH
    • Il y a rejet aigu irréversible en 8 à 10 jours ; la greffe allogénique est rejetée d'autant plus rapidement que les sujets sont génétiquement différents pour leurs molécules du CMH.
    • Une deuxième greffe du même donneur est rejetée de façon accélérée en 5 à 6 jours, ce qui traduit l’induction d’une mémoire immunologique vis-à-vis des antigènes d’histocompatibilité du donneur. Cette mémoire est spécifique, car une deuxième greffe venant d'un autre donneur n'est pas rejetée plus rapidement.
       

LE REJET

C’est une réaction immunologique faisant intervenir la mémoire immunologique. Cette mémoire est spécifique du donneur et transférable par les lymphocytes du donneur.
Le rejet de greffe est principalement dirigé contre les molécules du complexe majeur d’histocompatibilité qui est la base de ce que l’on désigne "groupes tissulaires".
Le rejet d’une allogreffe est déterminé par la présence, sur le greffon, d’antigènes qui n’appartiennent pas à l’organisme receveur.

LA PRISE D'UNE GREFFE

L'acceptation du greffon se traduit dès le 3ème jour par la revascularisation du greffon, sans infiltrat cellulaire. La prise est définitive dès le 8ème jour.

Le rejet suraigu ou rejet hyperaigu

DE QUOI S’AGIT-IL ?

Il apparaît dans les minutes ou les heures qui suivent la greffe. Il s’agit d’une thrombose des vaisseaux irriguant le greffon. Cette thrombose entraîne une nécrose (infarctus) du transplant avec des lésions irréversibles pour l’organe.

POURQUOI ?

Un des mécanismes de ce rejet est la fixation d’anticorps naturels (préformés), présents chez le receveur à l'intérieur des vaisseaux (endothélium vasculaire) du greffon. Ceci est constamment observé en xéno-transplantation qui est la greffe d'un organe provenant d'une autre espèce.

COMMENT LE PRÉVENIR ?

Pour éviter le rejet hyper-aigu, il faut, d'abord, respecter la compatibilité des groupes sanguins A, B et O.
De plus, on pratique systématiquement, avant la greffe, une épreuve de compatibilité lymphocytaire que l'on désigne sous l'expression : cross-match. Ce test consiste à vérifier que les lymphocytes du donneur ne sont pas détruits par le sérum du receveur.

Le rejet aigu précoce

DE QUOI S’AGIT-IL ?

Ces crises de rejet interviennent en général dans le courant de la deuxième semaine ou dans les premiers mois suivant la greffe. Leur incidence varie entre 30 et 50 % des cas mais sont réversibles avec un traitement adapté.

POURQUOI ?

Lorsqu’une cellule est introduite dans un organisme receveur, celui-ci la reconnaît comme étrangère. L’organisme receveur produit alors des anticorps qui sont des immunoglobulines (Ig) et des globules blancs spécifiques qui reconnaissent les antigènes HLA du donneur et détruisent les cellules qui les portent. 

 PAR QUELS MÉCANISMES ?

Ce phénomène naturel de rejet est bénéfique lorsqu’il s’agit d’un microbe mais est extrêmement dommageable lorsqu’il s’agit d’un organe transplanté.
Dans le cas des transplantations, la réaction immunologique du receveur, dirigée contre les antigènes portés par le greffon, est induite par les lymphocytes T CD4+ et CD8+ du receveur.
Les lymphocytes sont les cellules qui jouent un rôle déterminant dans les processus immunitaires de l’organisme. Elles vont provoquer des lésions tissulaires caractéristiques et perturber les fonctionnements du greffon.

LES ÉTAPES DU REJET

Les différents événements
Ils vont contribuer au rejet du greffon par l'hôte. Les principaux sont :

  • Multiplication des cellules T, dont la fonction est de reconnaître le greffon
  • Développement et maturation des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques, dont le rôle est de détruire les cellules du greffon étranger
  • Sécrétion par les lymphocytes T, au contact du greffon, de cytokines comme l'interféron et le TNF (Tumor Necrosis Factor) et des chimiokines. Ces substances ainsi secrétées aboutissent au rejet du greffon.
     

La séquence des événements
Le rejet est inéluctable vers le dixième jour suivant la séquence suivante :

  • Au 3ème jour, le greffon se revascularise, mais on note déjà la présence d’un infiltrat de cellules mononucléées, surtout autour des vaisseaux capillaires : cellules NK, lymphocytes T et macrophages
  • Au 5ème jour, la circulation sanguine se ralentit et des lésions apparaissent : œdème et thromboses vasculaires
  • Au 7ème jour, une nécrose du greffon se développe pour aboutir rapidement au rejet.
     

 COMMENT PRÉVENIR LE REJET ?

Les mesures prises systématiquement par les équipes de transplantation pour éviter ce type de rejet, rendent cette complication beaucoup plus rare de nos jours. Les principales mesures sont les suivantes :

  • Respect de la compatibilité des groupes tissulaires HLA, surtout DR,
  • Amélioration des conditions de prélèvement et de conservation de l'organe à transplanter
  • Mise en place prolongée d'un traitement immunosuppresseur

Le rejet chronique

DE QUOI S’AGIT-IL ?

C'est une réaction qui apparaît 2 à 3 ans après la greffe. On observe alors une détérioration lente, progressive et irréversible des fonctions du greffon. Le résultat de cette altération est la constitution de fibroses et de lésions vasculaires entraînant, à terme, la perte du greffon. Cette détérioration est appelée le syndrome de dysfonction du greffon.

SON INCIDENCE

C'est aujourd'hui la principale cause d’échec en transplantation. On estime qu’aujourd’hui, 50 % des greffés cardiaques développent un rejet chronique dans les 7 ans qui suivent la greffe, 50 % des greffés pulmonaires durant la 1 ère année.
L'étude histologique du greffon montre une fibrose autour des vaisseaux sanguins de l'organe greffé associée à des lésions vasculaires touchant principalement les artères.

POURQUOI ?

Les mécanismes de rejet, en particulier ceux des réactions inflammatoires, chroniques et fibrosantes, sont encore mal connus. Parmi les facteurs identifiés, on distingue des facteurs non immunologiques : hypertension, immunosuppresseurs et des facteurs immunologiques : survenue d'un ou plusieurs rejets aigus, traitement immunosuppresseur suboptimal la première année…
La réaction immunitaire impliquée est à médiation mixte cellulaire et humorale.

En résumé...

 

 Type

Quand

Acteurs

 Rejet hyper-aigu

Heures

Anticorps

 Rejet aigu 

Jour

Lymphocytes T

 Rejet chronique 

Années

Immunologique + inflammation

Mise à jour

10 mai 2021